Film anti-autoritaire et facétieux sorti en 1972 sous le nom du Groupe Eugène Varlin, Albertine traite du sujet des "filles-mères" et des droits à la sexualité et à l'avortement pour les mineur·e·s. Entre les films de l'ARC et l'esprit de Zéro de conduite, toujours fidèle à la Psychothérapie institutionnelle de Tosquelles, Albertine est une charge juvénile contre l'aniénation sociale et familiale. Les jeunes filles manifestent, revendiquent d'accéder à la découverte de soi, bref tout sauf "Famille-Religion-Hypocrisie". Au discours pompidolien gerbatif répondent les photos d'enfants en lutte, de vrais-fausses manifs et des débats parsemés de fous-rires. Franssou Prenant, qui joue Albertine dans le film, a appris le montage en travaillant sur le film, et a entrepris par la suite sa propre carrière de cinéaste. Une perle du cinéma militant français à ne pas manquer.
Jacques Kébadian a commencé son travail au cinéma dans les années 60, en devant l'assistant de Robert Bresson. Son premier film, en 1967, met en scène la vie de Trotsky, avec Patrice Chéreau dans le rôle titre, et la participation de Guy et Joani Hocquenghem. En 1968, il confonde le collectif militant ARC, qui réalise Le Droit à la parole, Joli mois de mai, et Comité d'action 13. La même année, il embauche comme ouvrier à l'usine de peinture Valentine, où il lutte contre les conditions de travail déplorables, notamment en diffusant un bulletin, Valentine Poison. Son action lui vaut deux mois de prison avec sursis. Plus tard, il consacrera des films à la mémoire arménienne, à des figures de femmes résistantes (Germaine Tillion et Geneviève de Gaulle), au mouvement zapatiste, à un comité de soutien aux sans-papiers, et à des artistes – Ipoustéguy, Paradjanov, Chion ou dernièrement, Pierre Guyotat. Il n'a jamais cessé d'être révolté.