Toute la colère qui se saisit de moi me renverse dans un océan rageur et trouble au sein duquel se mêlent un grand nombre de reproches, d’atermoiements et de ressentiments.
A savoir l’architecture ostentatoire, le caractère sacré de la propriété, la montée des extrémismes. Je trouve aussi que le prix des boissons dans les bars est devenu prohibitif, quand, comme moi, on ne suce pas que des glaçons.
Lorsque ces pensées m’envahissent, non seulement, je ne peux pas dormir mais je m’asperge de ketchup pour me laver de la rage que je peux avoir contre les gens et les institutions en général. Je ne parle même pas des partis politiques ni des mièvres débats qui agitent la France parce qu’alors là autant manger une omelette rassise depuis 60 jours, que de donner le moindre crédit à ces gens détestables et vils. Le ketchup est si bon que toutes les omelettes moisies servies avec du ketchup et des frites sont plus digestes que le moindre mot d’un homme politique français !
Camille Zéhenne (née en 1985, vit et travaille à Paris) est artiste et chercheure. À travers des pratiques mixtes, vidéo, performance, écriture, elle choisit, analyse et rend compte d’objets, de faits et d’enjeux qui constituent et animent nos sociétés contemporaines, dans leurs dimensions matérielle, symbolique et politique : les femmes épluchant des pommes de terres au cinéma, la mythologie des smart city, la disparition des bars de nuit, les formes poétiques hors des textes, le détournement par le jeu.